Relation Client : jusqu’où ira le métavers ?

Né dans la science-fiction, le métavers est aujourd’hui bien réel. S’il commence à susciter l’intérêt des marques, à offrir de nouvelles opportunités, il soulève aussi de nombreuses questions.

Arnaud Bouchaud, Directeur des Solutions Digitales d’Armatis nous éclaire sur ce sujet.

Le métavers : proposons une définition…

De Neal Stephenson, l’auteur visionnaire des années 90, à Mark Zuckerberg, nombreux sont ceux qui ont donné une définition du métavers.

De mon point de vue, le métavers est un univers virtuel accessible à l’aide d’un casque de réalité virtuelle qui offre une immersion totale dans un monde où il est possible de se sociabiliser, se divertir et consommer.

Aujourd’hui, les acteurs économiques utilisent principalement le métavers pour y proposer des offres et des services virtuels, tels que des vêtements et accessoires pour modifier l’apparence des avatars numériques – les « skins » – mais il existe encore assez peu de jonctions entre le réel et le virtuel.

Or, les « métanautes » ne trouveront de l’intérêt dans cet environnement uniquement s’ils en tirent des bénéfices perceptibles dans la vie réelle. L’absence de nouveaux services pertinents a justement fait retomber l’effervescence de la plateforme Second Life à la fin des années 2000.

Au contraire, certaines initiatives proposent aujourd’hui des pistes intéressantes pour conjuguer le réel et le virtuel.

Citons par exemple la Fondation Yves Rocher qui, pour tout arbre planté dans le l’univers Minecraft, s’engage à replanter un arbre dans la vraie vie. L’artiste contemporain Damien Hirst, quant à lui, a proposé récemment l’achat de ses œuvres dans deux versions : virtuelle (NFT) ou réelle. Pour l’achat d’un NFT, son double réel était détruit. Et inversement.

Datas, éthique, organisation monopolistique : un usage risqué

Comme toute innovation, le métavers arrive avec son lot de risques potentiels. J’en identifie trois principaux.

Le premier concerne les données des utilisateurs. Si l’anonymat est déjà de moins en moins préservé sur Internet, il est probable qu’il devienne quasiment inexistant dans le métavers.

Au-delà des données liées à l’identité, cette technologie va pouvoir aller encore plus loin.

Par exemple, un constructeur automobile a dernièrement mis au point une concession virtuelle qui permet d’essayer ses véhicules, d’en modifier les options, etc.  Si le simple regard de l’utilisateur se pose un certain temps sur une partie spécifique de la voiture, tel que le tableau le bord, par exemple, les algorithmes qui animent cet univers l’interprètent comme un sujet d’intérêt pour l’utilisateur en question et peuvent alors juger opportun d’exploiter cette donnée.

Le traitement de cette information semble vertueux de prime abord pour proposer une relation ultra-personnalisée avec la marque, mais soulève la question de savoir comment seront utilisées toutes les données liées aux interactions dans un environnement généraliste.

Une deuxième faille possible pourrait émerger des règles éthiques qui ne sont pas encore bien définies dans le métavers. Cette question va devoir être rapidement considérée pour éviter d’éventuelles déviances de la part des utilisateurs, mais aussi des acteurs économiques en place lesquels ont, dans le monde réel, déjà des principes différents selon qu’ils proviennent des Etats-Unis, de la Chine ou de l’Europe, par exemple.

Enfin, il est possible d’identifier un troisième risque lié, celui-ci, à la gestion monopolistique du métavers.

Au vue de la manne économique que peut représenter ce nouveau terrain de jeu, chaque acteur en place va chercher à obtenir une position dominante. Or, s’il est important que le public ait accès au métavers via une plateforme globale rassemblant tous les services possibles – boutiques, concerts, formation… –, il semble dangereux qu’un acteur unique dicte ses propres règles et conditions d’accès et d’utilisation dans le  métavers. L’alternative serait d’imaginer une plateforme principale qui reposerait sur un système décentralisé, à l’instar des dispositifs qui se développent autour du Web 3.0, tels que la Blockchain.

De nouvelles opportunités pour la relation-client

Comme le téléphone, l’email ou le chat en leur temps, le métavers invite à repenser le rôle de conseiller client. Ce dernier va pouvoir être encore plus proche des clients qui, comme lui, existeront sous la forme d’avatars.

La possibilité de créer à la fois des interactions visuelles, vocales et écrites va enrichir nos relations avec les clients et mobiliser les dimensions conversationnelles et comportementales des conseillers clients en plus de solliciter leurs compétences numériques.

Chez Armatis, nous nous préparons depuis déjà plusieurs années à cette évolution en recrutant des profils ayant une forte appétence pour le digital et en mettant au point des formations immersives pour nos équipes.

Nous, experts de la relation-client, avons un rôle crucial à jouer auprès des acteurs économiques que nous allons pouvoir accompagner dans l’interaction avec leurs clients selon les nouveaux codes imposés par le métavers et pour les guider dans ces nouveaux services émergeants.

Par rapport aux risques évoqués plus haut, nous allons également pouvoir assumer un rôle de régulateur.

Notre expertise et notre posture orientée client nous placent dans la position du tiers de confiance. En tant que professionnels de l’interaction avec les clients, nous maîtrisons les questions de gestion des données personnelles et d’éthique comportementale, deux composantes qui peuvent conditionner le succès du métavers.

J’ajouterais enfin un dernier point sur lequel cette plateforme va devoir progresser : la capacité à créer de l’étonnement.

En effet, les biais algorithmiques ont tendance à placer les internautes dans une bulle, au milieu de références et de produits qui leurs ressemblent. Mais les heureuses surprises de la vie sont celles qui font la différence.

Ça tombe bien, créer l’inattendu est notre spécialité !

Arnaud Bouchaud, Directeur des Solutions Digitales.

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